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Tous les textes, sauf indication contraire: © Jean Robert Bourdage 2012 - 2019

29.3.11

Ce jour-là, les volets étaient entrouverts. Les bruits de la machinerie s'étaient finalement arrêtés. On entendit une voix d'homme proférer un juron dans une langue étrangère. Depuis combien d'années vivait-il là? dix? douze? sans jamais adresser la parole à personne. Le peu de fois qu'on l'apercevait, fumant une cigarette sur  le pas de la porte, il se mettait toujours à regarder autour de lui, devinant qu'on l'épiait. Lorsqu'il nous repérait, il nous fixait, le regard plein de méfiance, et son énorme moustache nous empêchait d'être certain si l'injure qu'on lui prêtait venait vraiment de lui ou si nous l'imaginions. Cela faisait maintenant deux semaines que les bruits de machinerie se faisaient entendre tous les jours. Des bruits d'engrenages, de génératrice, des bruits de scies, des coups de marteaux. Et maintenant le silence, et un juron. Le fleuriste d'en face a interrompu l'arrosage de ses plantes, la D'Agostini a cessé de battre son tapis, Enzo est sorti de son magasin. Moi, je suis sur mon balcon comme à mon habitude. Tous ensemble, sans s'être donnés le mot, nous attendons la suite.
«Vint un temps où le risque de rester à l'étroit dans un bourgeon était plus douloureux que le risque d'éclore»

-Anaïs Nin

Avant