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Tous les textes, sauf indication contraire: © Jean Robert Bourdage 2012 - 2019

9.3.12

Une fable inédite de LaFontaine retrouvée dans une malle

(Le texte est un exercice de style que j'ai composé pour le groupe L'Entonnoir, où nous devions faire d'un violon et un arrosoir les éléments centraux d'une histoire)


(AFP) - Un manuscrit non publié du célèbre fabuliste a été retrouvé dans une malle, suite à des travaux de réfection dans un immeuble abandonné du IIIe arrondissement de la capitale française. Plusieurs autres textes inachevés et notes feraient aussi partie du lot. La découverte fut faite par un maçon, qui a immédiatement averti les autorités.  Le manuscrit a immédiatement été confié à l’Académie Française qui l’ajouta à la collection du Trésor National. Bien que considéré comme une oeuvre mineure, il semblerait que le texte soit authentique, et témoignerait de l’état d’âme de l’auteur lors des derniers jours de sa vie.

Le violon et l’arrosoir

Au fond d’un jardin, sous un banc, oublié, gisait un violon.
Il était vieux, les cordes usées, et n’avait que paroles pour seul son.

À ses côtés, était un arrosoir, debout, abandonné.
Il avait mine basse, et quoiqu’étanche, il était tout rouillé.

Après des mois de silence, le violon s’adressa à l’arrosoir, d’une voix affaiblie
«Vieillir est terrible. Jadis, de moi, on prenait soin.» Commença l’instrument aigri.
«Et la musique qui sortait de mes entrailles était un son divin»
«Mais voilà, je suis seul, sans archet, sans virtuose, sans écrin.»

Sur quoi, l’arrosoir rétorqua: «Comme si vous saviez à quel point je vous comprends»
«Moi qui me sentait si utile, chaque jour, chaque matin d’arroser le potager»
«De voir tous ces légumes grandir, les fruits, les fleurs, tels mes petits enfants»
«Mais, c’est terminé, je ne contiens plus qu’eau de pluie, au point de déborder»
«Ah quel triste sort quand j’y pense!»
«Vous qui nourrissiez l’âme, moi qui remplissait les panses»

Tout à coup, du violon, il vint une idée.
«Arrosez-moi, cher ami, si je peux vous demander?»

«Vous arroser, très cher? Mais ce serait votre fin!»
«Et loin de moi l’idée d’être de ce sombre dessein!»

«Arrosez-moi!» répéta-t-il. «Que peut-il m’arriver de pire?»
L’arrosoir se vida sur le violon, qui de suite, se mit à faiblir.

«Oh non!» dit l’arrosoir. «Vous mourez, et je serai seul avec mon chagrin»
Et le violon de répliquer «La nuit sera dure, certes, mais vous verrez au petit matin»

En effet, comme le dit le violon, au réveil, l’arrosoir fut surpris.
Du violon, de partout, sortaient des pousses et bourgeons
Des racines l’ancraient au sol; l’arrosoir fut ravi.
Et après chaque averse, chaque ondée, il arrosa le violon.

De nos jours, du violon, il ne reste plus rien.
Mais un arbre, colosse, avait envahi le jardin.
Et le son du vent dans ses branches, était ma foi, fort bon.
Musiciens s’assoyaient à ses pieds, cherchant l’inspiration.

Et pour remercier l’arrosoir de lui avoir donné seconde vie
Il l’entoura de son écorce, et le fit grandir avec lui.
Une amitié est née, éternelle et indiscociable
Et c’est sur ce vers, braves gens, que je vous livre ma dernière fable.

(Le texte est un exercice de style que j'ai composé pour le groupe L'Entonnoir, où nous devions faire d'un violon et un arrosoir les éléments centraux d'une histoire)

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